Pourquoi la médecine du genre n'est pas une science, et n'est pas une médecine, partie 1
- La Petite Sirène
- 20 oct.
- 15 min de lecture
Discours d'Hélène Joyce à la conférence CASC à Adélaïde en Australie, le 18 octobre 2025.
Trad. Fr.
J'ai eu la chance d'être invitée à prononcer l'un des discours d'ouverture de la conférence inaugurale du Gender Healthcare Summit, organisé par la Coalition Advancing Scientific Care, une organisation australienne qui vise à intégrer des considérations fondées sur des données probantes à la médecine de genre, en particulier pour les mineurs. Mon intervention a duré une heure ; je partagerai donc mes notes d'intervention en trois articles distincts dans les prochains jours. Voici le premier.
Imaginez que nous soyons ici pour parler d’une autre spécialité médicale. Ce ne serait pas très réaliste, car dans aucun autre domaine de la médecine je ne serais, moi — qui ne suis pas médecin — en train de donner la conférence principale. Et cela ne dit rien de particulier sur la position que je défends en matière de médecine du genre, car les conférences organisées par des associations qui soutiennent la position diamétralement opposée à la mienne sur ce sujet invitent elles aussi beaucoup de non-médecins à y prendre la parole.
WPATH et ses déclinaisons régionales, comme EPATH, ont été dirigées par des personnes qui ne sont pas du tout médecins — simplement des personnes qui s’identifient comme trans — et tout le monde peut y adhérer, il suffit de payer une cotisation. Des thérapeutes familiaux, par exemple, y adhèrent parce que cela leur donne l’apparence d’une forme d’expertise sur la détresse liée au genre. Et, à côté des sessions spécialisées portant sur les avancées en techniques chirurgicales, ces conférences comprennent aussi des ateliers sur des sujets tels que « les créations sur les réseaux sociaux par des personnes transgenres et de genre divers » ou « les expériences d’entraînement vocal en groupe chez les personnes transgenres et de genre divers ».
Mais imaginons malgré tout qu’il s’agisse d’un congrès consacré à un tout autre domaine de la médecine. Tous les participants partageraient un large socle de compréhension commune sur les points suivants :
Ce que signifie, pour l’organe ou le système concerné, fonctionner correctement — ce qu’est un système immunitaire, circulatoire ou une articulation de la hanche en bonne santé, etc.
Les dysfonctionnements possibles de cet organe ou système — un système immunitaire hyper- ou hypoactif, un rythme cardiaque irrégulier, des douleurs et raideurs articulaires — et les symptômes qui les accompagnent.
Comment effectuer un diagnostic différentiel pour identifier précisément ce qui dysfonctionne — on ne parle pas de « fièvre » ou de « douleur thoracique » comme de spécialités, car ces symptômes peuvent provenir de nombreuses affections différentes, et il faut déterminer soigneusement leur cause chez chaque patient.
Pourquoi les choses tournent mal — syndrome post-viral, rétrécissement des artères, usure du cartilage de la hanche, etc.
Ce qu’il est possible de faire pour rétablir le bon fonctionnement de l’organe ou du système, totalement ou partiellement.
Et, si cela n’est pas possible, ce qu’il est possible de faire pour atténuer les symptômes — c’est-à-dire limiter ou contrôler les effets néfastes, ce qui suppose d’avoir une idée de ce que signifie « aller mieux » ou « aller plus mal », impliquant donc des jugements de valeur.
La probabilité de succès de l’intervention, et son degré d’efficacité.
Les effets négatifs éventuels du traitement — et il y en a presque toujours.
Je reconnais qu’il existe moins de consensus sur les diagnostics psychologiques que sur les diagnostics physiques, et sur les causes des maladies mentales par rapport à celles des maladies physiques. Mais il existe tout de même une compréhension largement partagée de ce que signifie fonctionner sainement.
Les premières parties de ce cadre ne figureraient pas au programme du congrès, car elles sont fondamentales : elles relèvent de la définition même de la santé et des soins, et de la compréhension de base dans un domaine donné. Ce que l’on y trouverait, ce sont les aspects plus appliqués — les changements de protocoles de traitement, les nouvelles techniques opératoires ou thérapeutiques, les preuves sur les résultats, les effets secondaires, etc.
Tout ce qui découle de la mécanique de la médecine fondée sur les preuves : études de cas, études prospectives et longitudinales, essais randomisés en double aveugle et revues systématiques de la littérature.
On oublie facilement que cette mécanique ne peut fonctionner que parce qu’on part d’une compréhension commune de ce qu’est la santé. Sans cela, il est impossible même de concevoir ce qui peut « mal tourner », puisque l’on ne sait pas ce que « mal » veut dire. Et, sans cela, on ne peut ni formuler d’hypothèses sur les causes d’un dysfonctionnement, ni proposer d’idées plausibles de traitement.
Vous voyez sans doute où je veux en venir : la médecine du genre n’est pas de la médecine, parce que personne ne sait ce que signifie avoir un genre fonctionnant sainement. J’imagine que quelqu’un du domaine dirait que cela revient à « ne pas souffrir de dysphorie de genre », mais ce n’est qu’une façon sophistiquée de dire « ne pas souffrir d’une détresse liée à quelque chose d’indéfini ». Et notons aussi que les spécialistes du domaine affirment qu’il n’y a rien de pathologique à être trans, que c’est une variante naturelle — ce qui est paradoxal, puisque selon leur propre logique, les gens en viennent à se dire trans précisément parce qu’ils souffrent d’une détresse à propos de cette chose indéfinie appelée genre. Et, sans savoir ce que c’est qu’un genre ou une identité de genre « saine », il est impossible de dire ce que serait un genre dysfonctionnel, ce qui l’aurait causé, ni comment le traiter.
Dire que quelqu’un souffre de dysphorie de genre, c’est comme dire que ses humeurs sont déséquilibrées. C’était la théorie grecque antique pour expliquer la santé et la maladie, qui a perduré jusqu’au Moyen Âge — les quatre humeurs étaient le sang, le flegme, la bile jaune et la bile noire. Les traitements consistaient en saignées et purges : des remèdes sans fondement, parce que la théorie elle-même était erronée.
C’est la même chose avec la médecine du genre. Les traitements proposés — bloqueurs de puberté, hormones croisées, chirurgies mammaires et génitales, entraînement vocal, etc. — sont les équivalents modernes de la saignée et de la purge. Il n’y a aucune raison de penser qu’ils fonctionnent.
On pourrait mener des recherches scientifiques sur les quatre humeurs, si l’on voulait. On pourrait proposer des hypothèses, organiser des essais, produire des résultats, et ainsi de suite. On obtiendrait des données, et des pistes pour de futures recherches.
Mais ce serait tomber dans le piège que la docteure Harriet Hall — médecin décédée en 2023, partisane d’une médecine rationaliste et critique des pseudo-sciences — appelait la « science de la fée des dents » (Tooth Fairy Science). C’est comme si l’on décidait que la fée des dents existait, et qu’il serait intéressant de déterminer comment maximiser la somme d’argent qu’elle laisse sous l’oreiller.
Hall a écrit :
« Vous pouvez étudier si laisser la dent dans un petit sachet en plastique rapporte plus d’argent de la Fée des dents que de la laisser enveloppée dans un mouchoir. Vous pouvez comparer la somme laissée pour la première dent et pour la dernière. Vous pouvez corréler les gains de la Fée des dents avec le revenu des parents. Vous pouvez obtenir des données fiables, reproductibles, cohérentes et statistiquement significatives. Vous aurez l’impression d’avoir appris quelque chose sur la Fée des dents. Mais non. Vos données ont une autre explication : le comportement des parents, que vous n’avez même pas envisagé. Vous vous êtes trompé vous-même en essayant de faire de la recherche sur quelque chose qui n’existe pas. »
Tout cela revient à dire que les critiques de la médecine du genre commencent généralement trop en aval. Les critiques ont raison de dire qu’il n’existe aucune bonne étude montrant des résultats positifs pour ces interventions, et aucune preuve que les bloqueurs de puberté ou les hormones croisées « sauvent des vies ». Mais il y a un problème plus fondamental : il n’existe aucune raison de penser que les pratiques menées dans les cliniques de genre pourraient fonctionner en principe. Tout repose sur une invention, tout comme la théorie des humeurs autrefois.
Lorsque nous commençons nos critiques par le manque de preuves, nous accordons trop de crédit aux médecins du genre. C’est à eux qu’incombe la charge de la preuve, pas à nous. Ils devraient commencer par expliquer ce qui ne va pas chez une personne en détresse à propos de son genre, et pourquoi les traitements qu’ils proposent pourraient avoir un effet.
Même si toutes les études critiques sont négatives — et elles le sont très souvent —, le fait même de les prendre au sérieux revient à leur faire un compliment qu’elles ne méritent pas. Car cela revient implicitement à accepter l’idée que ces interventions pourraient fonctionner, alors que, comme pour la Fée des dents, les hypothèses possibles sont infinies : différents traitements hormonaux, différentes chirurgies génitales, différents calendriers, et toute une série de compléments tels que l’entraînement vocal ou la chirurgie de féminisation faciale. Ils ne manqueront jamais d’hypothèses à tester — mais rien ne justifie de le faire en premier lieu.
L’une des raisons pour lesquelles nous ne voyons pas que la médecine du genre relève de la « science de la Fée des dents », c’est que la revendication est trop vaste. Il est difficile d’admettre qu’un entier domaine médical ne devrait tout simplement pas exister. Les scandales médicaux ne prennent généralement pas cette forme. Ce sont plutôt des affaires comme celle des implants de bandelettes vaginales, où de nombreuses femmes ont été gravement blessées par l’implantation d’un filet synthétique pour traiter un prolapsus des organes pelviens. On comprend très bien pourquoi quelqu’un a pu croire que ce traitement fonctionnerait : le scandale ne réside pas dans l’hypothèse ou dans le test initial, mais dans le fait qu’il n’a pas été suffisamment testé, et que les femmes dont l’état s’est aggravé ont été ignorées, ce qui a permis à la pratique de se prolonger trop longtemps.
La plupart des gens présument naturellement que les médecins du genre savent ce qu’ils font, comme les cardiologues ou les immunologistes, car pourquoi penseraient-ils le contraire ? Ces praticiens ont des diplômes, des revues scientifiques, des cliniques, et des sociétés savantes. Ainsi, la majorité des gens, même s’ils reconnaissent certains arguments critiques, pensent simplement que le domaine « est allé trop loin », comme cela s’est déjà produit dans d’autres branches de la médecine — que ces cliniciens ont simplement été trop téméraires.
Et beaucoup de ceux qui voient de près à quel point les choses peuvent mal tourner ont une vision très étroite : une personne qu’ils aiment est concernée, et ils se concentrent naturellement sur ce qu’ils peuvent lui dire pour la convaincre. Ils veulent connaître les preuves relatives à certaines interventions précises, car il ne leur sert plus à rien de dire que tout cela ne devrait pas exister du tout.
Une autre raison pour laquelle nous ne percevons pas le vide de la médecine du genre, c’est que les cliniques de genre imitent parfaitement la médecine. Judith Butler a dit un jour que le genre est une « imitation sans original » — qu’il n’a de sens que parce qu’on le rejoue sans cesse. Eh bien, les acteurs de la médecine du genre imitent les rituels médicaux : prise de rendez-vous, consultations, diagnostics, prescriptions, analyses sanguines, orientations vers d’autres spécialistes comme des chirurgiens ou des endocrinologues, et affirmations sur les résultats et l’efficacité.
Et lorsqu’ils interagissent avec les financeurs, les assureurs ou les gouvernements, ils parlent comme s’ils pratiquaient réellement la médecine.
Mais ces rituels sont vides, exactement comme Butler l’affirmait à propos des rituels de genre.
L’expression « dysphorie de genre » ne sert en réalité qu’à remplir un vide, à fournir un terme qui permet de construire des phrases ressemblant, dans leur forme, à celles que l’on pourrait employer pour parler d’une angine de poitrine, d’une sclérose en plaques ou d’une schizophrénie — mais, puisque l’expression elle-même est dénuée de sens, ces phrases le sont aussi.
En réalité, la médecine du genre est purement performative — ce qui, d’ailleurs, devrait ravir les théoriciens queer, eux qui adorent la performativité. Et le thème de cette performance est l’affirmation hyper-libérale, ou hyper-individualiste, selon laquelle chaque individu possède un « vrai moi », le connaît, et que lorsqu’il en exprime la vérité, il ne peut pas se tromper, puisque ce « vrai moi » se définit par sa propre déclaration. Le but de la médecine du genre est de donner une apparence de solidité à un type particulier de déclaration de soi — celle de son identité de genre.
Ce que les cliniques vendent, c’est de la validation identitaire.
Si vous pensez qu’une identité de genre est de ce type — quelque chose qu’un individu peut faire exister en la déclarant — alors ce n’est pas seulement aux cliniques de genre que revient cette fonction. Cela s’étend à tout ce qu’elles appellent « genré » et que le reste d’entre nous appellerait simplement non mixte : espaces, services ou sports réservés aux femmes ou aux hommes, qui seraient, selon cette logique, des lieux où les personnes “féminines” ou “masculines” peuvent “performer” leur genre respectif.
Mais en réalité, ce n’est même pas tout à fait juste, car il n’y a aucune exigence de performance du genre, seulement une exigence de déclaration. Rien d’autre n’est requis de la personne que l’énoncé : ce sont les autres qui doivent faire le travail, en croyant à cette déclaration — autrement dit, en affirmant ce genre.
L’expression « autodétermination de genre » est donc un abus de langage : ce n’est pas quelque chose qu’il faut accomplir, au-delà de la simple proclamation, mais une exigence adressée aux autres de vous reconnaître comme le genre que vous affirmez être.
Pousser la porte marquée “F” ou “M” devient une façon de déclarer son identité de genre.
Il n’y a aucune place pour le jugement des autres, aucun rôle pour eux si ce n’est celui d’acteurs secondaires ou de public bienveillant.
Aucun espace pour dire qu’ils ne souhaitent pas participer à la performance, ou pour être critiques et affirmer qu’elle n’est pas convaincante.
Ils n’ont pas le droit de dire :
« D’accord, tu dis que tu es une femme, que tu vis en femme ou que tu as une identité de genre féminine, mais tu ne me sembles pas très féminine. »
Une femme peut faire la chose la plus évidemment non masculine qui soit — tomber enceinte — et être quand même en train de « vivre en homme », tant qu’elle le dit.
Un homme peut faire les choses les plus évidemment non féminines possibles — mettre une femme enceinte ou la violer — et rester « une femme », tant qu’il dit qu’il en est une.
Parce que, désormais, « les hommes peuvent tomber enceints » et « les femmes peuvent violer aussi ».
C’est une supercherie.
On remplace la réalité physique du sexe biologique par quelque chose appelé genre ou identité de genre, sans jamais le définir.
Les gens qui ne suivent pas de près ce débat pensent qu’il s’agit de quelque chose de défini — généralement quelque chose de très sexiste, du type : « les femmes sont celles qui font des choses féminines ».
Mais au moins, cela conserve une once d’objectivité.
Ici, au contraire, il ne s’agit que d’un homme disant : “Je suis une femme.”
Il n’y a rien derrière.
Pour bien saisir cela, pensez à ce que signifie être gay ou hétérosexuel — avoir une attirance exclusive, ou presque, pour les personnes d’un sexe ou de l’autre.
Mais si un homme vous disait qu’il est gay alors que vous savez qu’il est marié à une femme, que vous le connaissez depuis longtemps, et qu’il n’a eu que des petites amies, pas de petits amis, vous seriez en droit de penser qu’il n’est pas sincère, ou du moins qu’il se trompe.
Supposons maintenant qu’on change la définition d’homme gay en « performer la gay attitude » — l’équivalent de « vivre en femme ».
On obtiendrait alors une définition du genre : « aime Kylie Minogue et les comédies musicales, travaille comme danseur de ballet ou coiffeur » (ajoutez ici vos stéréotypes favoris).
Il y a une part de vérité dans les stéréotypes — c’est pour cela qu’ils existent —, mais au moins ils restent objectivables.
Même avec une telle définition, il serait encore possible de dire de quelqu’un qu’il n’est pas gay, même s’il le prétend.
Mais ce qui se passe avec le genre va encore plus loin.
Il ne reste rien d’objectif, même plus les stéréotypes.
Il ne reste que la déclaration.
En 2019, la Los Angeles Review of Books a publié un article sur Pete Buttigieg et son mari, s’inspirant d’une couverture du Time Magazine où on les voyait tous deux, très « normaux » et posés. Le titre de l’article était « Heterosexuality Without Women » (L’hétérosexualité sans femmes), avec en sous-titre :
« Cette photo parle de beaucoup de choses, mais l’un de ses traits les plus marquants est son hétérosexualité. »
C’est la définition même de l’idée de « gay » comme performance du gay : il ne suffit plus d’avoir des relations sexuelles avec une personne du même sexe — voire d’être marié à elle. Apparemment, Buttigieg et son mari n’étaient pas assez “camp”. Cette régression vers les stéréotypes est déjà déprimante, mais, au moment même où elle était écrite, elle était déjà dépassée.
L’année précédente, Miley Cyrus avait épousé Liam Hemsworth — un couple hétérosexuel riche et magnifique, elle en robe blanche, lui en costume, photographiés pour un magazine de mode —, et elle déclara que c’était ce à quoi ressemblait un « mariage queer ».
Je n’ai aucune prétention à être autre chose que banalement hétéro, mais je peux dire que ce mariage aurait été beaucoup trop hétéro même pour moi.
Mais Miley Cyrus avait bien mieux compris le sens du mot “queer” que l’auteur de l’article de la LA Review of Books. Cela ne signifie rien d’autre que de dire : « Je suis queer. »
Et c’est exactement la même chose pour tout ce qui touche aux identités de genre : en avoir une, c’est simplement affirmer qu’on en a une.
D’après mon expérience des discussions avec des personnes qui n’ont pas été formées — voire endoctrinées — aux croyances sur le genre, elles pensent qu’il est question soit d’un caractère personnel observable, probablement inné, soit d’un trouble physique ou psychologique sérieux. Quelque chose d’intrinsèque et de diagnostiquable.
Elles croient que ne pas le reconnaître chez quelqu’un, ou ne pas le traiter si cette personne souffre, serait immoral.
Je pense que ceux qui participent au rituel du genre savent parfaitement que la plupart des gens extérieurs le comprennent de travers.
Ils savent que les juges qui donnent raison au parent souhaitant bloquer la puberté, les travailleurs sociaux qui estiment qu’un adolescent de 13 ans devrait recevoir des hormones croisées, les enseignants qui affirment le genre d’un élève, et les parents qui suivent le conseil du thérapeute de genre d’utiliser les pronoms préférés, croient tous qu’il existe une catégorie particulière de personnes, les « trans ».
Mais ceux à l’intérieur du système savent que tout ce qu’il faut pour être de cette catégorie spéciale, c’est le dire.
Lorsqu’on finit par comprendre le fossé entre ce que les gens extérieurs au rituel du genre pensent qu’on leur dit, et ce que les initiés disent réellement, les interventions physiques paraissent encore plus monstrueuses.
Si ce que les cliniques vendent, c’est de la validation identitaire — et si Miley Cyrus et Liam Hemsworth peuvent être « queer » dans un mariage blanc des plus traditionnels — alors pourquoi les cliniques administrent-elles des médicaments et pratiquent-elles des chirurgies ?
Pourquoi ne peuvent-elles pas simplement dire à leurs patients ce qu’elles affirment croire : que les femmes peuvent avoir un pénis, que les hommes peuvent tomber enceints, que les femmes trans sont des femmes, que les hommes trans sont des hommes, et que les identités non binaires sont valides, et qu’il est transphobe de penser qu’il faut modifier son corps pour valider son identité ?
Pourquoi donc empêcher la “mauvaise puberté” et sectionner les pénis et les poitrines ?
Que peut bien signifier « soins d’affirmation du genre », si avoir une identité de genre consiste simplement à affirmer qu’on en a une ?
Ils essaient de monter deux chevaux à la fois : d’un côté, ils affirment qu’il s’agit de médecine, donc qu’il faut faire des choses médicales — c’est-à-dire affirmer qu’il y a un désalignement et qu’on propose un traitement pour le corriger ; et, de l’autre, ils affirment que les gens sont déjà ce qu’ils disent être, que les personnes trans ne « transitionnent » pas puisqu’elles ont toujours été ce qu’elles affirment être.
Et pourquoi tentent-ils de monter deux chevaux à la fois ?
Eh bien, la réponse dépend du degré de cynisme que l’on y met.
Je ne doute pas que beaucoup de gens, à l’intérieur de ce rituel, se soient égarés dans ces contradictions et croient sincèrement faire le bien.
Mais je ferai trois observations :
1. Beaucoup de gens entrent en médecine avec un “complexe du sauveur”.
Mais, même comparée aux autres branches, la médecine du genre donne un pouvoir immense et une validation morale : celle d’être « bons » et « progressistes ».
Ils peuvent se présenter comme ceux qui sauvent des enfants souffrants, les aident à renaître en eux-mêmes, remodèlent la chair humaine — tout en donnant au monde des leçons de morale.
2. Il y a là quelque chose de profondément païen : plus le sacrifice corporel est grand, plus la croyance paraît réelle.
Si l’on ampute une partie de son corps et qu’on sacrifie son système reproducteur à son identité de genre, alors cette identité doit bien exister.
Pour tous ces adeptes qui prétendent prendre au sérieux les déclarations de chacun, il est insatisfaisant de s’en tenir là.
Prendre des mesures irréversibles au service de son identité de genre devient une preuve d’engagement : on montre que c’est vraiment réel, qu’on y croit vraiment.
3. Enfin, c’est un secteur très lucratif.
Comme l’a dit le journaliste américain Upton Sinclair :
« Il est difficile de faire comprendre quelque chose à un homme quand son salaire dépend précisément du fait qu’il ne le comprenne pas. »




