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  • Photo du rédacteurLa petite Sirène

Extraits en français de la revue systématique allemande de Zepf et al. février 2024

Dernière mise à jour : 10 mars




Zepf et al., Hogrefe, Zeitschrift für Kinder- und Jugendpsychiatrie und Psychotherapie (Revue de psychiatrie et de psychothérapie pour enfants et adolescents), volume 52, issue 1, janvier 2024

Cette revue systématique actualise les 2 revues systématiques sur les bloqueurs de puberté (PB) et les hormones sexuelles croisées (CSH) qui ont été réalisées en 2020 par le NICE (National Institute for Health and Care Excellence) à la demande du Dr. Cass, pour le service national de santé du Royaume-Uni. (Ces revues sont appelées : NICE 2020a et NICE 2020b.)

Ces deux revues n’avaient pas trouvé de bénéfice clinique spécifique à l’administration de PB et CSH pour des améliorations des symptômes de la dysphorie de genre, GD. De plus, la qualité globale des preuves examinées a été classée selon le système GRADE modifié avec une « certitude très faible », signifiant que « l’effet réel est susceptible d’être considérablement différent de l’effet estimé ».

 

Les chercheurs allemands de cette étude ont repris la procédure utilisée par les revues du NICE pour analyser les nouvelles études publiées de juillet 2020 à juillet 2023.

En utilisant les critères de sélection des revues du NICE (critères PICO), ils ont trouvé :

·       aucune nouvelle étude sur les bloqueurs de puberté ;

·   2 nouvelles études sur les hormones sexuelles croisées. (Grannis et al., 2021 ; Morningstar et al., 2023)

D’autres études publiées depuis 2020 « ont été exclues principalement faute de comparaisons adéquates des effets des traitements ».


Les 2 nouvelles études « avaient des échantillons de faible taille, n’ajoutaient aucune nouvelle preuve significative sur les effets bénéfiques spécifiques du CSH chez les mineurs atteints de DG et ont été classées comme « faible certitude » en utilisant le système GRADE modifié. »


Ils concluent : « Il n’existe actuellement aucune preuve d’un rapport coût-efficacité potentiel pour l’utilisation des PB/CSH chez les mineurs ayant une dysphorie de genre par rapport à une ou plusieurs interventions psychosociales, à une transition sociale vers le genre préféré ou à l’absence d’intervention. »


Ci-dessous, des extraits de l’étude. Les passages en gras sont rajoutés par Magali Pignard.


Résumé

Contexte

La suppression de la puberté physiologique par des bloqueurs de puberté (PB) et l’administration des hormones sexuelles croisées (CSH) chez les mineurs souffrant de dysphorie de genre (GD) est discutée comme une intervention pour ces personnes et est parfois utilisée dans la pratique clinique pour cette population. Deux revues (une sur les PB, une sur l’administration de CSH) du National Institute for Health and Care Excellence (NICE) de 2020 n’ont montré aucun bénéfice clinique clair en termes de variables critiques ou d’autres variables importantes, en particulier aucune amélioration claire des symptômes de la GD. De plus, la qualité clinico-scientifique des preuves disponibles jusqu’à présent a été classée comme « très faible » selon le système GRADE modifié.


Méthodologie

Cette revue systématique comprend une recherche bibliographique selon la procédure NICE pour les travaux publiés depuis les deux revues NICE mentionnées ci-dessus sur les PB et l’administration de CSH chez les personnes atteintes de GD (période de recherche de juillet 2020 à août 2023).


Résultats

·       La nouvelle recherche bibliographique n’a révélé aucun nouvel article original sur l’administration de PB répondant aux critères PICO prédéfinis en ce qui concerne les variables critiques ou importantes selon NICE.

·       Concernant l’administration de CSH, deux nouveaux articles originaux [Grannis et al., 2021 ; Morningstar et al., 2023] avec un faible nombre de participants ont été trouvés, remplissant les critères PICO, mais classés comme ayant une faible sécurité ou qualité clinico-scientifique selon les critères du système GRADE modifié, et n’ont pas apporté de nouvelles preuves solides.

·       Les études actuellement disponibles sur l’administration de PB et de CSH présentent des lacunes conceptuelles et méthodologiques significatives.


Conclusions

·       Les preuves actuellement disponibles sur l’utilisation de bloqueurs de puberté (PB) et/ou hormones d’affirmation de genre (CSH) chez les mineurs atteints de dysphorie de genre sont très limitées et reposent sur quelques études présentant une méthodologie et une qualité insuffisantes. Il n’existe pas d’études contrôlées à long terme.

·       Les preuves actuelles ne montrent pas de manière fiable, selon les critères PICO et le système GRADE modifié, que l’administration de PB et/ou CSH améliore de manière significative la dysphorie de genre et la santé mentale chez les mineurs.


·       Il n’existe actuellement aucune preuve d’efficacité potentielle de l’utilisation de PB/CSH chez les mineurs ayant une dysphorie de genre par rapport à une ou plusieurs interventions psychosociales, à la transition sociale vers le genre préféré, ou à l’absence d’intervention.


·       Si, après un diagnostic psychiatrique complet et approfondi chez les mineurs atteints de dysphorie de genre et une évaluation des bénéfices et de dommages de l’attente, la dysphorie de genre et éventuellement les troubles psychologiques associés nécessitent l’utilisation de bloqueurs de puberté et d’hormones sexuelles contraires, une telle approche pourrait contribuer à l’acquisition de connaissances supplémentaires et fournir des données importantes dans le cadre de projets de recherche ou d’études cliniques, comme c’est actuellement le cas en Angleterre.


Résultats depuis la publication du dernier rapport de synthèse du NICE sur l’administration de la CSH (2020b)

 

Études inclues selon la procédure NICE concernant les études publiées depuis les deux revues NICE

Morningstar et al., 2023 : Exogenous testosterone administration is associated with differential neural response to unfamiliar peer’s and own caregiver’s voice in transgender adolescents

Objectif : examiner la réponse neuronale relative aux signaux socio-émotionnels, chez des adolescentes s’identifiant trans recevant ou non de la testostérone.

·       19 garçons trans recevaient de la testostérone (groupe GAH+).

·       25 n’en recevaient pas (groupe GAH-).


Grannis et al. 2021 : Testosterone treatment, internalizing symptoms, and body image dissatisfaction in transgender boys

 

Cette étude a recruté 42 adolescentes s’identifiant trans d’une clinique de genre dans l’Ohio.

19 recevaient de la testostérone et 23 non.

 

Conclusion : Les adolescentes qui recevaient un traitement à la testostérone avaient des scores inférieurs sur les mesures d’anxiété généralisée, d’anxiété sociale, de dépression et d’insatisfaction de l’image corporelle.

 

[…] Au total, seules deux études répondant aux critères PICO ont été trouvées pour l’administration de la CSH (Grannis et al. 2021 ; Morningstar et al., 2023). En outre, 29 études (principalement observationnelles, parfois rétrospectives) ne répondaient pas aux critères PICO (généralement en raison de l’absence de possibilité de comparaison des effets observés, par exemple un groupe traité et un groupe non traité, etc.) […]. Par conséquent, seules les deux nouvelles études originales répondant aux critères PICO (Grannis et al., 2021 ; Morningstar et al., 2023) seront abordées ci-dessous.

 

·       L’étude de Grannis et al. (2021) a inclus des mineurs : avec administration de testostérone (N = 19 ; âge moyen de 17,03 ans + /– 1,24 ; durée moyenne du traitement à la testostérone de 13,13 mois + /– 10,28 ; dose moyenne de testostérone de 242,11 mg + /– 82,97) et sans administration de testostérone (N = 23 ; âge moyen de 15,75 ans + /– 1,47) dans le cadre d’une étude IRMf sur la transition FtM pour examiner le traitement des visages ou des expressions faciales.

[…].Lors de cette enquête, des symptômes d’anxiété généralisée, d’anxiété sociale, de suicidalité et de satisfaction à l’égard de l’image corporelle ont également été évalués. Cependant, cette étude n’a pas pu examiner explicitement les effets spécifiques du traitement sur ces variables en raison du manque de données sur ces variables avant le début du traitement et après le traitement. De plus, il n’y a pas eu de randomisation, bien que cela ne soit pas un critère d’inclusion PICO. Il s’agissait simplement d’une étude exploratoire par IRMf pour examiner le traitement des visages en association avec l’évaluation des symptômes cliniques susmentionnés chez les participants avec ou sans administration de testostérone. Le niveau d’anxiété et de dépression au moment de l’étude était statistiquement significativement plus faible dans le groupe traité à la testostérone par rapport au groupe non traité, et il y avait une tendance à une moindre suicidalité dans le groupe sous traitement à la testostérone, bien que les effets antidépresseurs directs d’une administration de testostérone ne puissent pas être exclus. Le groupe traité à la testostérone a signalé significativement moins de troubles liés à l’image corporelle et a montré une connectivité plus forte dans un circuit neuronal entre le cortex préfrontal et l’amygdale par rapport au groupe non traité. Les différences entre les groupes concernant la dépression et la suicidalité ont montré une association ou une corrélation statistiquement significative avec la satisfaction/insatisfaction à l’égard de l’image corporelle. Le degré de symptômes anxieux a été modéré par les différences de connectivité entre les deux groupes dans les connexions susmentionnées entre l’amygdale et le cortex préfrontal.

 

·       Morningstar et al. (2023) a étudié les effets de la testostérone sur le traitement neural des stimuli vocaux émotionnels par rapport à des stimuli parentaux similaires chez les mineurs en transition FtM avec administration de testostérone (groupe GAH+, N = 19 dans l’échantillon final analysé, plage de doses de 12,5 à 60 mg/semaine, dose la plus courante étant de 25 mg/semaine, âge compris entre 14 et 18 ans, âge moyen de 16,21 ans + /- 1,13) et sans administration de testostérone (groupe GAH-, N = 25 dans l’échantillon évalué, âge compris entre 12 et 18 ans, âge moyen de 15,32 ans + /- 1,49) dans le cadre d’une étude basée sur l’IRMf. […].

Les résultats ont montré une réponse neuronale atténuée dans le cortex cingulaire antérieur (ACC) aux voix en colère des parents et une réponse accrue aux voix en colère inconnues des pairs dans le groupe GAH+. Dans le groupe GAH-, un effet inverse a été observé, avec une plus grande réponse neuronale aux voix joyeuses inconnues des pairs par rapport aux voix joyeuses des parents dans cette région cérébrale. Les auteurs de cette étude ont spéculé sur une "réorientation sociale potentiellement plus avancée" dans le groupe GAH+, car la réponse neuronale réduite dans l’ACC aux voix en colère des parents dans ce groupe était associée à un lien relatif plus fort avec les amis par rapport aux parents. Selon les auteurs de l’étude Morningstar, cela est cohérent avec les aspects du développement adolescent, car la testostérone pendant l’adolescence influencerait l’évaluation des stimuli émotionnels dans les régions cérébrales impliquées dans le traitement des informations affectives.

 

La fiabilité ou la qualité des preuves pour les paramètres étudiés dans le cadre des deux études supplémentaires identifiées sur l’administration de la CSH (Grannis et al., 2021 ; Morningstar et al., 2023) peut être classée comme "faible certitude" selon les critères Modified-GRADE.

 

Caractéristiques des études non prises en compte dans le NICE

La méthodologie utilisée dans la revue du NICE sur l’administration de PB (NICE, 2020a) a été critiquée sur les réseaux sociaux car, selon les critiques, des études pertinentes n’ont pas été prises en compte. Cela concerne les études d’Achille et al. (2020), de Vries et al. (2014), Ghelani, Lim, Brain, Fewtrell et Butler (2020), Jensen et al. (2019), Klaver et al. (2018), Klaver et al. (2020), Kuper et al. (2020), Schagen, Lustenhouwer, Cohen-Kettenis, Delemarre-van de Waal et Hannema (2018), Swendiman, Vogiatzi, Alter et Nance (2019), Turban, King, Carswell et Keuroghlian (2020), van der Miesen, Steensma, de Vries, Bos et Popma (2020) ainsi que le travail de Vrouenraets, Fredriks, Hannema, Cohen-Kettenis et de Vries (2016).

 

Il semblait donc judicieux de reconsidérer en détail ces travaux. Le résultat de cette réévaluation était le même que celui de la revue du NICE sur l’administration de PB (NICE, 2020a). Comme il est apparu clairement, il s’agissait :

·       d’études sans définition claire d’une question posée de manière comparative avec un critère de jugement prédéfini au format PICO : Ghelani et al. (2020) ; Jensen et al. (2019) ; Klaver et al. (2018) ; Klaver et al. (2020) ; Schagen et al. (2018) ; Vrouenraets et al. (2016) ;

·       d’études de qualité médiocre :

o   Turban et al. (2020), les auteurs de l’étude n’ont pas rapporté séparément les données pour les analogues de la GnRH par rapport à d’autres interventions ;

o   dans l’étude de Swendiman et al. (2019), moins de 10 % des participants avaient une GD et leurs données n’ont pas été rapportées séparément ;

o   Achille et al. (2020) n’ont pas non plus rapporté les données séparément selon les interventions) ;

·       de travaux avec les mêmes participants à l’étude (de Vries et al. (2014) ; l’échantillon était déjà inclus dans l’étude de de Vries et al. (2011), ce qui devrait être explicitement pris en compte dans l’interprétation des résultats, en particulier en ce qui concerne les variables considérées respectivement.

Le travail de Kuper et al. (2020) n’a été pris en compte que dans la revue du NICE sur l’administration de CSH (NICE, 2020b) mais pas dans la revue du NICE sur l’administration de PB (NICE, 2020a) car il incluait principalement des participants recevant une CSH. Il présente des lacunes méthodologiques similaires à d’autres études exclues : en plus de l’administration de CSH, d’autres interventions ont été réalisées ; une attribution des résultats observés aux interventions respectives n’est pas possible, et il n’y avait pas de groupe témoin. Le travail de van der Miesen et al. (2020) n’a pas été inclus dans la revue pertinente du NICE car les effets rapportés ne peuvent pas être clairement attribués au groupe PB en raison d’un soutien psychosocial concomitant et de l’absence de groupe témoin.

Discussion

[…] Les preuves trouvées ont été évaluées quant à leur qualité méthodologique à l’aide d’une méthodologie GRADE modifiée. Dans le système GRADE, la qualité des preuves est évaluée du point de vue des critères finaux, c’est-à-dire en ce qui concerne les variables cibles pertinentes. La confiance dans l’amplitude de l’effet rapporté est évaluée en tenant compte du plan d’étude, du risque de biais, du manque de précision, de l’incohérence, de l’indirectivité et de la force de l’effet. […]

Nouvelles études depuis la publication des revues systématiques du NICE

Une limitation importante concernant l’étude de Grannis et al. (2021) sur l’administration de CSH est qu’aucune correction n’a été apportée pour les tests multiples sur le même ensemble de données (par exemple, dans le cadre d’un ajustement alpha selon la méthode de Bonferroni-Holm ou selon Hommel-Hochberg), ce qui signifie que de fausses significativités positives ne peuvent être exclues. De plus, il n’est pas clair dans quelle mesure les résultats obtenus ici (Grannis et al., 2021), en particulier concernant les variables critiques définies par le NICE, sont réellement attribuables au traitement par testostérone dans le sens de la spécificité des résultats. Les raisons en sont que pour le groupe traité par testostérone, aucune donnée antérieure à l’administration de testostérone n’était disponible, qu’il n’y avait pas de randomisation des groupes et qu’aucune information détaillée sur d’autres interventions ou traitements accompagnants n’est disponible. Il est seulement indiqué que tous les participants avaient reçu un "soutien comportemental affirmatif pour la santé" en raison de leur dysphorie de genre et que tous les participants n’avaient pas encore reçu de PB. Aucune information supplémentaire n’est fournie sur un éventuel suivi psychothérapeutique ou d’autres interventions psychosociales.

 

Dans le groupe traité par la testostérone selon Grannis et al. (2021), 52,63 % ont reçu un traitement antidépresseur ou anxiolytique pharmacologique, tandis que dans le groupe non traité (c’est-à-dire sans administration de testostérone), ce taux était de 78,26 %. Cependant, cette différence dans la proportion de participants à l’étude recevant un traitement psychopharmacologique entre le groupe traité par la testostérone et le groupe non traité n’était pas statistiquement significative (niveau de signification de p < 0.01). Ainsi, en raison de la proportion de participants à l’étude recevant un traitement psychopharmacologique concomitant, on peut supposer une charge psychique cliniquement pertinente chez plus de la moitié des participants des deux groupes, et les effets du traitement psychopharmacologique prescrit sur les variables étudiées ne peuvent pas être exclus. En raison des limitations décrites ici, la spécificité des résultats de Grannis et al. (2021) est incertaine et l’échantillon d’étude est limité en termes de taille. De plus, il n’est pas possible d’exclure les éventuels effets antidépresseurs directs (ou éventuellement additifs) dus à l’administration de testostérone dans le groupe déjà traité par la testostérone. À la lumière de l’étude de Grannis et al. (2021), aucune nouvelle déclaration concernant l’administration de testostérone chez les adolescents souffrant de dysphorie de genre ne peut être faite en tenant compte des critères PICO définis par le NICE.

 

Dans l’ensemble, les deux nouvelles études (Grannis et al., 2021 ; Morningstar et al., 2023), parues depuis la publication des deux revues de synthèse du NICE (NICE, 2020a, 2020b) et répondant aux critères PICO susmentionnés, ne fournissent pas de nouvelles conclusions fiables concernant les variables cibles critiques et importantes définies par le NICE. Les raisons en sont les suivantes : la conception respective des études (l’objectif des deux études n’est pas explicitement l’évaluation de l’efficacité clinique de l’intervention [administration de PB, CSH] par rapport aux variables cibles définies par le NICE) ; absence de randomisation, absence de données de base ou de suivi liées au traitement), le très faible nombre d’échantillons, la spécificité peu claire des résultats et le risque de biais ou de distorsion très élevé associé à ces résultats d’étude. L’absence de randomisation accroît le risque de biais systématique, car les effets éventuellement observés en cas d’absence de randomisation peuvent résulter non pas de la manipulation expérimentale intentionnelle, mais de différences non voulues entre les groupes respectifs. De plus, les deux nouvelles études incluses concernaient exclusivement des personnes en transition FtM et n’ont pas pris en compte les influences directes immédiates sur la variable cible critique, à savoir la dysphorie de genre.

 

État actuel des études

L’état actuel des études sur l’administration de PB et/ou CSH chez les enfants et les adolescents est très limité et repose sur quelques études provenant principalement de quelques centres, avec une méthodologie souvent insuffisante. Par conséquent, les résultats des études recueillies et présentées dans le cadre de ce travail, qui ont examiné les effets de la réduction ou de l’arrêt de la dysphorie de genre, ainsi que l’amélioration de la santé mentale (les soi-disant critères d’évaluation critiques), de la satisfaction corporelle et de la fonctionnalité globale et psychosociale (les soi-disant critères d’évaluation importants) chez les enfants et les adolescents atteints de dysphorie de genre, sont de qualité médiocre ; la confiance clinico-scientifique dans les effets rapportés (souvent non spécifiques) est donc faible.

 

Toutes les études incluses dans les deux revues de littérature du NICE (NICE, 2020a, 2020b) et dans le présent travail sont des études observationnelles, exposées au risque de biais et à l’influence d’autres facteurs non mesurés. La documentation et le contrôle de l’impact de la comorbidité psychique et somatique, ainsi que des traitements concomitants, étaient insuffisants dans toutes les études. Les études proviennent d’un nombre limité de centres de soins, souvent avec de petits échantillons, ce qui limite la généralisation des résultats à d’autres populations. Certaines études antérieures ne rapportent pas d’intervalles de confiance, et les rares différences pré-post statistiquement significatives concernant les mesures de changement examinées et la densité osseuse étaient généralement faibles (voir NICE, 2020a, 2020b pour un résumé des études antérieures). Leur importance clinique reste donc incertaine. Certaines études présentent d’autres faiblesses méthodologiques graves, telles que des lacunes dans l’analyse des données, une randomisation insuffisante (par exemple Grannis et al., 2021 ; Morningstar et al., 2023) et l’absence de critères de jugement prédéfinis et de données de suivi liées au traitement.

 

Dans l’ensemble, les résultats présentés ici des études existantes et traitées jusqu’à présent ne fournissent pas de preuves solides que l’administration de bloqueurs de puberté (PB) et d’hormones sexuelles croisées (CSH) chez les mineurs améliore la dysphorie de genre (GD) en particulier et la santé mentale en général. Une interprétation alternative, tout aussi importante pour les personnes concernées, pourrait être que même le maintien de l’expérience de la GD et du mécontentement corporel après une administration de PB représente déjà un succès relatif du traitement : l’administration de PB aurait peut-être empêché une détérioration clinique ultérieure en bloquant le développement des caractères sexuels secondaires perçus comme stressants. Cependant, même pour étayer cet effet potentiellement discuté ici de l’administration de PB, il aurait fallu disposer d’un groupe témoin, de sorte que cette interprétation ne peut actuellement être que spéculative.

 

La hausse de la prévalence administrative de la GD ces dernières années s’accompagne de changements dans les caractéristiques des populations étudiées et des populations ayant recours aux soins (Thompson et al., 2022a). On a récemment observé une augmentation du nombre de filles assignées à la naissance dont l’expérience de dysphorie de genre se manifeste pour la première fois à un âge précoce ou moyen de l’adolescence (voir Thompson et al., 2022a). De plus, on observe une prévalence plus élevée de troubles mentaux concomitants chez les enfants et les adolescents atteints de GD par rapport à la population générale (Kallitsounaki & Wiliams, 2023 ; pour un aperçu de 32 études individuelles provenant de 11 pays, voir Thompson, Sarovic, Wilson, Sämfjord & Gillberg, 2022b).

 

La force de ce travail réside dans la stratégie de recherche large avec des critères identiques à ceux des deux dernières revues NICE sur ce sujet, ainsi que dans l’évaluation de la qualité des preuves selon le système GRADE établie.

 

Conclusions sur les preuves actuelles

Dans l’ensemble, les preuves concernant l’efficacité du traitement du trouble de l’identité de genre (GD) chez les enfants et les adolescents présentant des bloqueurs de puberté (PB) et/ou des hormones sexuelles croisées (CSH) pour prévenir l’aggravation des effets potentiels d’une transition physique ou pour initier une transition physique sont actuellement insuffisantes. Les résultats des revues pertinentes du NICE (NICE 2020a, 2020b) et notre analyse complémentaire de la littérature des études publiées depuis lors, selon les caractéristiques PICO, ne permettent pas de démontrer de manière fiable les avantages cliniques pour les mineurs concernés en ce qui concerne les variables cibles examinées. Jusqu’à présent, il n’existe pas d’études à long terme contrôlées sur les effets positifs et négatifs des PB et CSH sur les paramètres psychologiques et somatiques chez les enfants et les adolescents atteints de GD. Cela soulève la question du contenu et de la valeur factuelle des conclusions cliniques des études existantes sur l’administration de PB et de CSH. Dans ce contexte, il est nécessaire d’évaluer, au cas par cas, le « préjudice causé par une action active » par rapport au « préjudice causé par l’attente » dans le cadre d’un processus dialogique et d’un concept diagnostique et thérapeutique multiprofessionnel. Les développements dans d’autres pays européens et non européens peuvent servir de guide.

 

 

 

 

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