top of page
  • Alison Clayton

Le modèle de traitement affirmatif de genre pour les jeunes atteints de dysphorie de genre : une avancée médicale ou une médecine dangereuse ?

Dernière mise à jour : il y a 2 jours

22 novembre 2021 - Alison Clayton



Introduction

La connaissance de l’histoire de la médecine enrichit notre réflexion sur les pratiques médicales contemporaines. Le XXe siècle a été le témoin de nombreuses avancées médicales. Il a également été le témoin de nombreux exemples de ce que l’on peut appeler une médecine dangereuse. Cette médecine est invasive, risquée et dépourvue de preuves rigoureuses, mais elle est adoptée et célébrée avec enthousiasme par les membres de la profession médicale et le public. Puis, avec le temps, cette médecine est considérée avec plus de scepticisme. On reconnaît qu’elle n’est pas aussi bénéfique qu’on le prétend et qu’elle cause plus de tort qu’on ne le reconnaît. Elle est généralement considérée comme malavisée, parfois même criminelle. Dans cette lettre, j’utilise un cadre historique pour esquisser une discussion sur l’approche thérapeutique affirmative du genre pour les jeunes atteints de dysphorie de genre (jeunes DG), en me concentrant particulièrement sur la chirurgie thoracique masculinisante. Je pose la question : cette approche est-elle une avancée médicale ou un exemple contemporain de médecine dangereuse ? J’espère que les idées exprimées dans cette lettre contribueront utilement au débat sur ce domaine complexe et controversé de la médecine.

Braslow ( 1997 ) a évoqué l’histoire de la psychiatrie du XXe siècle telle qu’elle était pratiquée dans les hôpitaux psychiatriques de l’État de Californie. Il a décrit comment les médecins peuvent transformer le nocif en « thérapeutique » en appliquant des « traitements » invasifs sur les patients dont ils ont la charge. Il a donné un exemple illustratif de la façon dont « le corps d’une femme offrait de multiples sites pour des interventions chirurgicales » visant à éteindre un « comportement pathologique ». Il a décrit une « femme au foyer » californienne de 28 ans, Rose, admise comme patiente involontaire en 1944. En 1949, son état mental perturbé et son comportement peu coopératif l’ont amenée à subir une lobotomie préfrontale radicale. Un an plus tard, son comportement « amoureux » a conduit son médecin à ordonner une cautérisation clitoridienne. Le lendemain de cette « procédure mineure », on a remarqué qu’elle continuait à se masturber et une deuxième cautérisation clitoridienne a été pratiquée. Rose a alors développé l’habitude de mordre les gens, ce qui a été résolu par l’extraction des dents (pp. 166-168).

Ce bref récit de Rose évoque toute une gamme d’émotions. Je ressens de l’horreur, de la tristesse, de la colère et de la peur. Pourquoi ces émotions ? Je suis un être humain et une femme. J’ai vécu l’expérience d’être une patiente entre les mains de médecins, comptant sur leur expertise, leurs soins et leur conscience professionnelle. C’est un cauchemar d’être totalement dépendante de médecins qui, même s’ils sont bien intentionnés, mettent en œuvre des interventions inefficaces, nuisibles ou punitives. Ma réaction émotionnelle à l’histoire de Rose est d’autant plus complexe que je suis également psychiatre. Par conséquent, une partie de mon horreur à la lecture de cette histoire vient du fait que je m’identifie à ces médecins qui mettent en œuvre de tels « traitements ». Je me demande : comment aurais-je traité des patients en tant que psychiatre dans les années 1940 ? Aurais-je fait ce que le psychiatre de Rose a fait ?

Un autre traitement historique célèbre était le traitement de la fièvre paludique, qui consistait à provoquer délibérément une maladie paludique chez des patients souffrant de paralysie générale des aliénés (GPI). La GPI était une forme grave de neurosyphilis et était une cause fréquente d’admission dans les institutions psychiatriques du début du XXe siècle. Bien que risquée, la thérapie paludique était censée réussir à guérir certains patients de cette maladie généralement mortelle. Elle a été utilisée des années 1920 aux années 1950, étant progressivement remplacée par la pénicilline (Davis, 2008 ). Le psychiatre britannique Shaw ( 1929 ) a proposé un point de vue dissident sur ce traitement célèbre. Il a imaginé une histoire de la psychiatrie en l’an 2500 faisant un « commentaire curieux et intéressant » sur les gens du début du XXe siècle qui se sont engagés dans une « tentative organisée pour épuiser leur population de aliénés en les infectant avec une maladie connue sous le nom de paludisme » (p. 15).

C’est une expérience curieuse de lire les mots de Shaw en 2021 : passé, présent et futur s’entremêlent. Les historiens contemporains critiquent les histoires de la médecine « whigs », qui se tiennent sur un terrain moral élevé pour critiquer les « mauvais vieux temps » (Lerner et Caplan, 2016 ). Cependant, d’autres mettent en garde contre l’utilisation du contexte historique comme « abri moral » disculpatoire (Reverby, 2018 ; Sadowsky, 2017 , p. 68). Que se passe-t-il si nous renversons la situation et nous demandons : comment les médecins historiques rendraient-ils compte de la médecine vers 2021, et comment en parleront-ils dans 100 ans ? Une telle expérience de pensée peut aider à élargir notre réflexion sur les pratiques médicales contemporaines. Ici, je l’applique spécifiquement à la pratique de la masculinisation de la chirurgie thoracique pour les jeunes GD.


Comments


bottom of page